C’est un nouveau parcours du combattant, mais le résultat esthétique en vaut la peine.

Reconstruire ou pas ? La question se pose dès que le chirurgien évoque l’ablation du sein. La reconstruction peut être immédiate, à certaines conditions. Mais la plupart du temps, les femmes doivent attendre trois à six mois après l’intervention, six mois après la chimiothérapie, ou un an après la radiothérapie, avant de penser à leur nouvelle poitrine. 

Sur le plan médical, ce délai est nécessaire pour que la peau récupère une certaine élasticité et que l’organisme puisse supporter, encore une fois, une opération. Sur le plan psychologique, c’est un temps de réflexion très utile. Certaines femmes acceptent, petit à petit, leur différence et s’accommodent d’une prothèse externe. D’autres n’envisagent pas la vie sans une reconstruction mammaire pour retrouver un aspect physique le plus normal possible.

 

 

AUGMENTER SES CHANCES

Avant de se lancer dans une reconstruction du sein, il faut prendre le temps de discuter avec un chirurgien-plasticien, voire en rencontrer plusieurs. A l’aide de photos ou de dessins, celui-ci doit expliquer les différentes étapes et donner un aperçu du résultat.

Il n’y a pas d’âge limite pour la reconstruction, en revanche l’état de santé général est primordial. 

 

TROIS ETAPES POUR RECONSTRUIRE LE SEIN

La reconstruction se déroule au minimum en trois interventions, espacées en général de trois mois. La première permet de rétablir le volume du sein. La deuxième symétrise la poitrine et gomme les différences entre les deux seins. La troisième sert à refaire une aréole et un mamelon. Le choix de la technique dépend de l’histoire médicale de la patiente, de l’état de sa peau et de sa morphologie.

 

LA POSE D’UNE PROTHESE :

Pour qui ? les femmes dont l’état de la peau est satisfaisant.

En pratique : l’incision est faite suivant la cicatrice de mastectomie. La prothèse est ensuite glissée sous le muscle pectoral. Le meilleur résultat esthétique est obtenu avec une prothèse remplie de gel de silicone. 

Avantages : un résultat esthétique très valorisant, sans cicatrice supplémentaire.

Inconvénients : les deux seins ne vont pas vieillir au même rythme. De même, en cas de perte de poids, l’un va « retomber » mais pas l’autre. Autre inconvénient : la prothèse a une durée de vie de dix ans environ. Il faudra donc réintervenir pour la changer.

A savoir : la pose d’une prothèse ne gêne pas l’indispensable surveillance médicale après un cancer. Les mammographies sont effectuées tout à fait normalement.

 

LE LAMBEAU DE GRAND DORSAL :

Pour qui ? les femmes dont la quantité de peau laissée après l’ablation du sein est insuffisante ou en mauvais état.

En pratique : on prélève, dans le dos, le muscle grand dorsal et un morceau de peau. Si cela ne suffit pas à reconstruire le volume du sein, deux solutions : une prothèse est rajoutée ou des injections de graisse sont pratiquées.

Avantages : en l’absence de prothèse, il n’y aura pas de différence esthétique sur les deux seins au fil du temps.

Inconvénients : une perte de force musculaire dans le bras qui, en principe, ne gêne pas les gestes de la vie quotidienne. En revanche, cette technique n’est pas conseillée chez les grandes sportives (tennis, escalade, équitation …). De plus, il laisse encore deux cicatrices : une dans le dos, une sur le sein.

LE LAMBEAU DE GRAND DROIT :

Pour qui ? cette technique convient aux femmes qui ont un « petit bedon ».

En pratique : la reconstruction se fait à partir du muscle grand droit, situé au niveau des abdominaux, en prélevant la peau et la graisse sous l’ombilic.

Avantages : la silhouette est plus fine et les deux seins gardent le même aspect au fil du temps.

Inconvénients : une perte de force musculaire dans les « abdos », gênante pour porter de lourdes charges. Il laisse une cicatrice de plus au-dessus du pubis.

 

Prothèse ou greffe ? Quelles sont les techniques de reconstruction ?

« Au-delà de la reconstruction mammaire, on vise à se reconstruire soi-même ». Pour certaines femmes, un nouveau sein est synonyme d’un retour vers la féminité et la confiance en soi, d’une nécessité pour retrouver une vie affective et sociale après le cancer.

Quelle que soit la voie choisie, prothèse ou greffe, il leur faut attendre au minimum un an après la fin du traitement pour entamer le processus de chirurgie réparatrice.

Quelques patientes choisissent la pose d’un implant de silicone sous le muscle. Chirurgie et hospitalisation courtes, remboursement intégral par la mutuelle ainsi qu’absence de cicatrice supplémentaire sont les atouts de la technique. Toutefois, « la reconstruction est parfois délicate car la peau de la région pectorale est devenue très fine suite à l’ablation et les rayons lui ont fait perdre son élasticité », explique le Docteur Gaëtan Willemart, chirurgien-plasticien et vice-président de la Société royale belge de chirurgie plastique.

« Au cours du temps, une dissymétrie dans la poitrine peut se marquer. Le sein reconstruit se rigidifie un peu plus et est moins souple ». Quand la prothèse montre des signes d’usure, dans les dix à quinze ans, elle doit être remplacée.

De plus en plus de femmes optent pour la reconstruction par tissus autologues. La méthode Diep est la plus courante. Il s’agit d’une auto-transplantation des tissus du ventre vers la région pectorale. « La peau du ventre est similaire à celle du sein, tant en couleur qu’en texture. La consistance de la graisse y est également très proche. Les vaisseaux, dont les ramifications sont révélées par l’angioscanner, sont disséqués. La peau et la graisse sont alors complètement détachées du corps, mais sans toucher au muscle. Le lambeau est greffé dans les minutes qui suivent. La reconnexion des petites artères avec les petites veines se fait au microscope, leur diamètre n’excédant pas 1 ou 1.5 mm », détaille le chirurgien. Le risque de thrombose est présent, le suivi post-opératoire est dès lors très rapproché. « Toutes les heures ou demi-heures, des infirmières inspectent les tissus transférés pour s’assurer qu’ils restent chauds et roses ».

Grâce à la vascularisation, la technique présente l’avantage de refaçonner un sein chaud et souple. « En outre, il va vivre avec la patiente et suivre ses variations pondérales. Avec l’âge, il va s’affaisser de la même manière que l’autre sein » ajoute le spécialiste.

Par la suite, si la poitrine demande à être équilibrée, le chirurgien prélève de la graisse au niveau des hanches ou du flanc pour la réinjecter dans un ou les deux seins afin de les rendre symétriques. Quelques mois plus tard, le mamelon est façonné soit en plissant la peau du sein en trèfle, soit via une greffe. En effet, si le mamelon restant est volumineux, il peut être découpé en deux sous-unités de plus petit diamètre. La dernière étape est le tatouage de l’aréole du sein.

Quid de la mastectomie préventive, à l’instar d’Angelina Jolie ? Dans ce cas, le chirurgien prélève uniquement la glande sans toucher à l’enveloppe cutanée du sein. La reconstruction en sera facilitée, laquelle peut avoir lieu au moment de l’ablation.

 

Extrait de LE SOIR PLUS du 21/10/2014

Numéro spécial «Tous unis contre le cancer du sein »

« LE SOIR » a enquêté sur les progrès de la 

médecine et sur le vécu des patientes.